Les deux géants japonais de l’électronique, Sony et Panasonic, souvent qualifiés d’éternels adversaires, ont décidé de faire cause commune dans le développement d’écrans de nouvelle génération organiques électroluminescents (OLED), une union nationale face aux rivaux sud-coréens.
Echaudés par leur incapacité actuelle à rester compétitifs sur les modèles de TV à technologie plasma ou à cristaux liquides (LCD), à cause de l’infernale compétition internationale et de coûts structurels trop élevés, Panasonic et Sony ont cette fois opté pour le partenariat stratégique, cachant sous le boisseau leur affrontement commercial.
Les deux groupes se sont entendus pour mettre en commun leurs savoir-faire respectifs dans les techniques de façonnage des écrans OEL jugés très prometteurs et sur lesquels ils travaillent séparément depuis plusieurs années.
Ils prévoient notamment d’exploiter des technologies dérivées de l’impression pour répartir les matériaux électroluminescents sur les substrats, un moyen à haut rendement pour fabriquer des TV OEL à prix raisonnable.
Les écrans OLED ou OEL, constitués de matériaux qui s’illuminent au passage d’un courant, offrent un rendu lumineux et colorimétrique homogène, avec un excellent contraste.
Ils sont en outre plus fins et moins énergivores que les modèles à plasma ou cristaux liquides car ne nécessitant pas de système de rétroéclairage. Ils peuvent de surcroît être flexibles en cas d’utilisation d’un substrat souple en matière plastique.
Pour le moment, les deux fleurons nippons s’en tiennent au développement commun des moyens requis pour constituer ces écrans, mais ils pourraient décider ultérieurement de les coproduire en masse, ou bien de confier les tâches de fabrication à un sous-traitant asiatique afin de limiter les risques liés aux investissements colossaux nécessaires.
Leur association vise en tout cas à accélérer les travaux pour être en mesure de proposer le plus rapidement possible, chacun sous leur propre marque, des modèles susceptibles de concurrencer ceux que les compétiteurs de Corée du Sud, Samsung Electronics et LG Electronics, promettent séparément de mettre sur le marché dès cette année ou la prochaine.
« Des partenariats entre féroces concurrents nippons dans le secteur de la télévision étaient autrefois impensables, mais ils sont maintenant nécessaires afin de récupérer l’avance technologique et le marché cédés aux fabricants sud-coréens », souligne l’agence de notation Fitch, rappelant au passage que « Samsung et LG ont tous deux déjà investi massivement dans le développement de TV OLED ».
« Pour les Japonais, mieux vaut tard que jamais », constate Alvin Lim, directeur adjoint des Télécommunications de Fitch qui pointe du doigt la nécessité de mettre les bouchées doubles, même si Sony et Panasonic détiennent des technologies qui, a priori, sont capables de tenir la dragée haute à celles de leurs adversaires.
En 2008 déjà, le groupe Panasonic (alors encore appelé Matsushita) prévoyait d’importantes ressources consacrées à la technologie OLED. Il s’apprêterait à présent à construire une ligne expérimentale de fabrication en série dans une usine au Japon, tandis que Sony produit déjà des écrans OEL de moyenne taille pour des applications professionnelles.
Sony, ex-champion des TV à tube cathodique Trinitron, avait de plus été en 2007 le premier au monde à commercialiser un téléviseur utilisant la technologie OEL jusqu’alors cantonnée aux petits afficheurs de baladeurs ou téléphones portables. En dépit d’un prix faramineux, la diagonale de cette TV ne dépassait pas 28 centimètres, mais Sony avait aussi dans ses laboratoires un modèle de 70 cm.
Depuis, Panasonic comme Sony ont poursuivi leurs recherches et amélioré leurs procédés pour les rendre moins onéreux, mais aucun ne s’est encore lancé dans la production en masse.
Leur partenariat est de facto censé être un moyen de rester dans la course sur le marché des TV, alors que tous les deux souffrent terriblement avec les modèles à cristaux liquides concurrencés tous azimuts par les fabricants asiatiques et impossibles à rentabiliser tant les prix de vente ont chuté.
Sony vient de totalement renoncer à la coproduction de dalles LCD, après avoir durant des années investi aux côtés de son plus gros concurrent, Samsung Electronics, dans une usine commune en Corée du Sud, ainsi que dans un gigantesque site de Sharp au Japon.
Sony se procure désormais des dalles LCD auprès de divers fournisseurs et les assemble à sa façon avec des composants spécifiques qui en améliorent le rendu ou étendent les fonctionnalités de ses téléviseurs, appareils qu’il juge essentiels dans sa gamme même s’il ne gagne plus d’argent avec depuis huit ans.
Quant à Panasonic, qui, à l’instar du pionnier japonais des écrans LCD, Sharp, avait dépensé des milliards pour ériger des usines de dalles au Japon, il a été contraint d’en fermer ou reconvertir une partie en raison du gouffre financier que cette activité a fini par représenter.
AFP
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